samedi 30 juin 2012
La hausse est injustifiée.
La hausse est injustifiée.
D’entrée de jeux, il est bon de rappeler que parmi les conclusions de la Commission Parent sur l’éducation, il y a plus de quarante ans, les commissaires ont recommandé la gratuité du primaire à l’université inclusivement. Une des raisons invoquées : le retard à rattraper des francophones en matière d’éducation. Ce retard existe encore aujourd’hui. En témoigne le fait que le Québec est, dans la fédération canadienne, la province qui reçoit le plus en péréquation, laquelle doit servir, en partie, à financer nos arriérages.
Si le Québec constitue une société distincte de par sa langue et sa culture, pourquoi ne se distinguerait-il pas aussi des autres provinces canadiennes et des États-Unis par sa manière de faire en éducation postsecondaire ? La question de fond qui devra être débattue par d’éventuels états généraux sur l’éducation au Québec sera : la pertinence de la gratuité des études universitaires.
Malgré la rhétorique prétendant que le Québec n’a pas les moyens d’une telle ambition, ils existent pourvu que l’on veuille bien se donner la peine de les développer. Bien sûr, il ne faut pas s’attendre à une politique de gratuité scolaire de bout en bout de la part de tout gouvernement néolibéral, néocapitaliste ou désireux de gouverner au centre. Seul un gouvernement qui mettra de l’avant des politiques visant à renforcer davantage le rôle de l’État providence sera en mesure de réaliser la gratuité scolaire à tous les échelons. Cela se fait ailleurs, dans les pays scandinaves entre autres. Les Québécois, fondamentalement en faveur de politiques visant une saine répartition de la richesse, ce qui est démontré par leur opposition au conservatisme harperien, sont mûrs pour le grand saut dans une véritable social-démocratie.
Comment financer la gratuité des études universitaires? Un moyen fort simple et proposé ad nauseam : une augmentation de la taxation des hauts revenus. Il n’y a pas qu’Amir Kadhir et Françoise David qui le proposent. Des milliardaires comme, Bill Gates ou Warren Buffet le demandent à Obama. Selon Thomas Piketty, économiste français, une hausse des taux d’imposition pour les revenus bruts individuels supérieurs à 110 milles dollars permettrait de réduire considérablement l’impôt payé par tous ceux qui gagnent en deçà de ce montant, soit 90% de la population. Dans un tel cas, il s’agirait pour le gouvernement de prélever une fraction de cette réduction d’impôts pour financer la gratuité des études de nos jeunes.
Il y a bien d’autres moyens pouvant être mis en oeuvre par un gouvernement qui a à cœur une répartition plus équitable de la richesse. Traquer davantage celles et ceux qui ne payent pas leur juste part d’impôts grâce au travail au noir et à l’évasion fiscale. Réglementer pour contrer la collusion et la corruption qui exagèrent de 20 % la facture à payer des contribuables pour la construction des infrastructures publiques. Le gouvernement fédéral pourrait faire sa part, lui qui, au milieu des années 90, a réduit de 50% les transferts fédéraux aux provinces pour l’éducation post-secondaire. Ce qui est d’ailleurs la raison principale du manque-à-gagner des universités québécoises aujourd’hui ; 800 millions par année, selon le ministère des Finances.
Aux États-Unis, pays avec lequel on aime bien se comparer lorsqu’il est question de droits de scolarité universitaires et de réduction du rôle de l’État, l’endettement des étudiants a pris des portions alarmantes. Il dépasse, tenez-vous bien, mille milliards de dollars. Comme point de comparaison, la dette souveraine américaine est de 1550 milliards de dollars. La dette estudiantine américaine est en train de devenir une bombe à retardement au plan social et financier. Des économistes la comparent à une bulle semblable à celle des prêts hypothécaires risqués, dont l’éclatement, en 2008, a plongé la planète tout entière dans la crise économique que nous subissons encore aujourd’hui.
400 milliards de la dette étudiante américaine sont passés entre les mains d’investisseurs sous la forme de papiers commerciaux adossés à des actifs (PCAA). Il est à souhaiter que la Caisse de dépôts et de placements du Québec n’a pas fait l’erreur, une nouvelle fois, de s’en procurer à nos dépends. La dette moyenne d’un étudiant américain est, présentement, de 25,000 dollars. Faut bien que les dérives comme celle de ce terrain de golf que s’est fait construire l’Université de l’Ohio se paient.
La scolarisation postsecondaire du plus grand nombre constitue un investissement pour la société, mais seulement dans la mesure où nos diplômés dénichent un emploi dans leur domaine d’études ou, à tout le moins, correspondant à leur à niveau de compétences. Et en autant qu’également, ils ne traineront pas une dette pour des années durant.
L’adage dit que lorsque les États Unis toussent, le Canada s’enrhume. Si les politiques forcent les étudiants à s’endetter de la sorte, il est illusoire de penser qu’au Québec, nous serons toujours à l’abri des dérapages financiers qui accablent d’autres pays.
Marcel Lapointe,Jonquière.
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