Monsieur François Saint-Gelais, éditorialiste, Le Quotidien de Saguenay.
Dans un récent éditorial intitulé « Vieilles ornières », trop rapidement vous concluez, à un débat enlisé qui n’a rien donné parce qu’il ne s’est pas conclu sur une solution médiane entre deux extrêmes soit : une vraie réforme des prêts et bourses associée à une hausse modulée des frais de scolarité. Solution qui, au demeurant, aurait permis à chacun des clans de sauver la face, ainsi que la session des étudiants.
Nous assistons à un débat socio-politique comme la société québécoise n’en a pas vu depuis des lustres. C’est le débat que tiennent, en marge de la crise économique, des groupes de citoyens partout sur la planète : les indignés en Espagne et en Grèce, les occupants de Wall Street à New York, le 18% d’électeurs français qui vont voter Melanchon, learder de l’extrême gauche, à l’élection présidentielle du 23 avril prochain. Les étudiants québécois ne font qu’ajouter leurs voix à ce concert de dénonciations d’un système injuste et immonde qui dure depuis déjà trop longtemps. Ils poursuivent dans une « nouvelle ornière » incarnée par ces différents groupes contestataires.
Sur la façon dont les étudiants ont de pratiquer la démocratie : une démocratie à la pièce, dites-vous? Parce que ces derniers suite au vote général, décident d’en exercer un par module. N’est-ce pas plutôt une façon de sortir de ces « vieilles ornières » que de pratiquer ainsi la démocratie qu’au demeurant, les étudiants n’ont pas inventée? En 1982, le Québec a refusé de s’inscrire dans la nouvelle constitution canadienne envers et contre les neuf autres provinces. Depuis, il tente, pas toujours comme certains le souhaiteraient, d’imposer sa juridiction, par exemple, en matière linguistique. Le cas du registre des armes à feu que le Québec veut récupérer contre la volonté du fédéral en est un autre exemple.
La crise économique, monsieur Saint-Gelais, vous le rappelez vous-même en évoquant la situation injuste que la compagnie Novelis fait subir à ses employés, est loin d’être terminée. Elle continue à faire des ravages partout sur la planète en produisant son lot de pauvres face à une richesse indécente, le mot est faible, détenue par quelques riches. Moins de 5% de ces derniers possèdent 40% de la richesse mondiale.
Comme vous, les étudiants et les professeurs qui les respectent dans leurs convictions croient que leur éducation est un investissement. Mais pas seulement pour leur avenir individuel, pour l’avenir de la collectivité québécoise également. En conséquence, il est injuste et irresponsable, comme le fait l’État, de barrer la route aux études universitaires à une foule de jeunes qui ont le potentiel pour les réussir, mais qui n’en ont pas les moyens financiers.
En plus de mettre en exergue le gaspillage des fonds publics par certaines institutions, la contestation étudiante a permis de nous allumer sur d’autres situations qui contribuent au marasme actuel prévalent dans les universités du Québec. On fait trop de place aux « vaches à lait » que sont les étudiants étrangers dans nos institutions au détriment d’étudiants québécois moins fortunés. Des institutions vendent leur âme à l’anglais pour en attirer davantage. Les étudiants étrangers dans les universités sont devenus une industrie en soi. C’est aberrant que nous soyons ici condamnés à servir davantage les intérêts des pays et des autres provinces canadiennes qui nous envoient leurs étudiants.
Il est aussi pertinent d’interroger les décisions du recteur de l’UQAC qui n’a pas trouvé mieux que sa « méthode préventive » de type manu militari pour mâter une « insurrection appréhendée » dans les murs de l’institution. On a traité le cas de l’UQAC comme si l’on avait à faire avec un état de siège dans un pénitencier à haute sécurité.
Intéressant, aussi, l’analyse voulant que plus vous forcez les étudiants, dont la majorité n’a ni auto ni les moyens d’un « spring breakdown » annuel en Floride, à travailler en même temps qu’ils étudient, plus vous en faites des consommateurs de crédits universitaires plutôt que des têtes bien faites. Cela n’est pas dans l’intérêt de la société québécoise.
En outre, je comprends mal le parallèle que vous tracez entre le fait que l’État ne peut supporter un gel ou une gratuité des frais de scolarité et la fermeture de l’usine Novelis. L’État ne peut plus rien faire; c’est comme Électrolux à L’Assomption. Il est, malheureusement, devenu trop tard pour la récupérer. Ici au Québec, on ne connaît pas cela, des ententes liant les compagnies qui s’y installent à produire localement. Pourtant, d’autres pays imposent de telles conditions pour donner aux compagnies le droit d’utiliser nos ressources naturelles.
Imaginez, à Sept-Îles, en 2012, ArcelorMittal hésite à produire ici des « boulettes », je dis bien, des boulettes, après soustraction du fer, richesse non renouvelable, du sol Québécois. Pire! Notre ministre, Serge Simard, dit qu’obliger des entreprises comme les minières du diamant à transformer localement une partie de leur exploitation va engendrer « de la pauvreté ».
Plus colonisé que cela… !
Marcel Lapointe,Jonquière.
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