Sans aucun doute, on fait ici, à notre manière, le débat qui a cours partout au Québec au sujet du Plan Nord. Avec, à la clef, la question suivante : quel est le juste retour des redevances que les entreprises doivent verser au peuple pour utiliser ses ressources?
C'est Rio Tinto-Alcan qui, le 30 décembre dernier, a sauvagement mis fin à la négociation. Aux dires du patron, Étienne Jacques, partout sur la planète depuis 16 ans, toutes les conventions ont été réglées entre la compagnie Rio Tinto et ses employés. Cependant, on ne connaît ni la nature des règlements, ni combien de contrats furent réglés le couteau sur la gorge le cas échéant.
En réponse à la manifestation d’une large coalition opposée à la manière dont la compagnie agit en forçant un règlement à coup de lock-out, Étienne Jacques n’a pas tardé à rappeler à nos bons offices le rôle inestimable, voire indispensable joué par Alcan au Saguenay-Lac-Saint-Jean depuis 86 ans. Histoire de faire pencher l’opinion publique du côté de la compagnie et de mettre de la pression sur la partie adverse à la table de négociation. Décidément, il n’y a pas que le gouvernement que les manifestations dérangent!
Pourquoi la compagnie a-t-elle refusé systémiquement de laisser une chance à la négociation au-delà du 31 décembre dernier? Rien ne dit que le syndicat serait parti en grève le 1er janvier 2012. Ne plus reconnaître que la négociation puisse se poursuivre au-delà de l’échéance en l’absence de lock-out ou de grève, voilà une nouvelle dynamique patronale de relations de travail à laquelle les syndicats sont désormais conviés. Pourtant, dans le public comme dans le privé, les négociations ont, très souvent, dépassé la date d'échéance du contrat de travail, justement, dans le but d'en arriver à un règlement négocié. Le vécu démontre que cela a fonctionné.
Cet arrêt de production de la part de la compagnie, on le sait maintenant, ne fut que prétexte. Tout le monde connaît les détails de l’entente cachée entre Rio Tinto-Alcan et le gouvernement. On sait aussi que parce que la crise économique perdure et qu’en conséquence les inventaires d'aluminium grossissent tout le temps, l'offre dépasse la demande. Benoît Aubin, journaliste au Journal de Montréal, parle des effets de la crise en ces termes : "Les États-Unis titubent encore, de nombreux pays d'Europe sont en crise (le mot et faible), la croissance s"essouffle en Chine¨. Quelle compagnie, dans ces conditions, serait malheureuse de suspendre sa production en attendant des jours meilleurs? Rio Tinto-Alcan d’Alma sans aucun doute !
En investisseur majeur et en producteur le plus performant qu'elle se dit être, la compagnie n’a plus à nous convaincre de sa contribution au bien-être socio-économique de la région. Les retombées de plusieurs milliards depuis plusieurs décennies le démontrent. Cependant, la compagnie ne devra jamais oublier que la région, grâce à ses ressources naturelles, humaines, conjuguées aux déductions fiscales de toutes sortes, aux subventions, aux prêts sans intérêt, lui a donné bien plus que ce qu'elle nous a retourné en redevances. Des miettes, comparées à ce qui s’est retrouvé dans les poches des actionnaires depuis 86 ans.
La compagnie se dit fière d'être au Saguenay-Lac-Saint-Jean pour opérer, innover, investir depuis 86 ans. Mais le bon citoyen corporatiste qu'elle prétend être là-dedans? Samedi dans les rues d’Alma, beaucoup de manifestants ont réclamé de Rio Tinto-Alcan des preuves de sa bonne foi en négociant la pérennité des emplois de qualité de son usine tant et aussi longtemps qu'elle exploitera le Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Quelle sera sa réponse?
Marcel Lapointe,Jonquière.
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