BAC en Soins infirmiers obligatoire: un
non-sens.
J'ai toujours supputé que la culture altière entretenue par trop de
membres de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) y était pour
quelque chose dans sa quête pour obtenir un prestigieux BAC pour toutes et tous
ses membres. Si un baccalauréat en Soins infirmiers obligatoire vient qu'à voir
le jour au Québec, je comprendrai que la logique des choses cède trop souvent
la place au pouvoir du lobby.
La complexification des besoins de soins, la transformation du système
de santé et l'évolution accélérée des connaissances scientifiques et
technologiques sont des arguments avancés par l'OIIQ pour qu'à partir de 2014,
on ne forme que des infirmières bachelières au Québec. Comme si le programme de
Soins infirmiers dispensé actuellement dans plus de 35 collèges au Québec ne
pouvait rencontrer les exigences liées aux progrès médicaux et aux besoins
changeants des clientèles. L'OIIQ fait semblant de ne pas voir que les
révisions périodiques imposées aux programmes collégiaux sont justement là pour
maintenir à son meilleur, tant aux plans scientifique que technologique, la
nécessaire adéquation entre ce qui s'enseigne dans les cégeps et ce qui doit être
pratiqué en milieu de travail pour rencontrer les exigences sans cesse renouvelées.
Quant aux compétences reliées aux relations humaines avec la clientèle,
l'expertise et les résultats sur le terrain en cette matière démontrent que
l'enseignement collégial en Soins infirmiers se compare avantageusement à la
formation qui se donne présentement dans les universités. J'en ai pour preuve
mes fréquentes visites à l'hôpital pour y recevoir des services.
Un récent sondage mené par la Fédération des Cégeps auprès d'étudiantes
et d'étudiants du secondaire révèle que 75% d'entre eux sont contre l'idée du
BAC obligatoire. Facile à comprendre: une chute dramatique de l'accessibilité
de nos jeunes aux études supérieures s'en suivrait. À l'évidence, les
universités ne seront jamais capables d'absorber la clientèle laissée pour
compte par la fermeture de 35 programmes collégiaux. Même plus, le manque de
disponibilité de l'université à maints endroits au Québec, contrairement aux collèges,
en découragerait un grand nombre de s'inscrire au BAC, obligés qu'ils seraient de
s'exiler pour étudier. Faut-il le rappeler aux hautes instances de l'OIIQ, contrairement
à la formation collégiale accessible et gratuite, la formation universitaire ne
l'est pas?
Et ce qui est loin d'être négligable, le projet de l'OIIQ, s'il se
concrétise, va inévitablement provoquer une pénurie d'infirmières, alors qu'un
contexte de vieillissement accéléré de la population québécoise est devenu
réalité. À ce titre, le Québec est premier au monde avec le Japon, selon de
récentes statistiques provenant de l'Organisation mondiale de la Santé.
Enfin, l'OIIQ, s'il ne travaille pas en vase clos, devrait savoir que
dans un peu plus de cinq ans, plus de 15, 000 infirmières seront éligibles à la
retraite chez nous. Ainsi que l'affirmait à juste titre la présidente de la
Fédération des infirmières et infirmiers du Québec, Régine Laurent: "On ne
peut pas se permettre de perdre une seule infirmière, dans aucune région".
Conséquemment, il est à souhaiter que la reprise, cet automne, des travaux du
Comité interministériel chargé du dossier d'un BAC obligatoire en Soins
infirmiers aboutira à une conclusion basée sur l'objectivité plutôt que sur la
pression de lobbyistes.
Blandine Lapointe-Brassard, Saguenay.
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